Quelles évolutions majeures avez-vous constaté sur le marché du vin?
La première évolution que j'ai constaté, c'est un intérêt grandissant des consommateurs pour le vin suisse. Par comparaison, lorsque que je travaillais chez Schenk, je vendais plus de la moitié de crus étrangers. Aujourd'hui, je vends exclusivement du vin de Bonvillars, et je sens que la clientèle est réellement attachée aux produits de la région, aux nectars suisses. D'ailleurs, j'observe tous les jours que le consommateur recherche l'authenticité des produits du terroir. C'est pourquoi, il est de plus en plus intéressé par la traçabilité. Il a besoin de rencontrer le vigneron, d'entendre l'histoire de son vin, de toucher les fûts...
Un autre changement perceptible est la montée en qualité des vins. Aujourd'hui, nous ne trouvons plus de mauvais crus sur le marché. Les producteurs travaillent pour offrir à leur clientèle des vins de qualité.
Quels sont les avantages d'être une femme à la tête d'une société viticole?
Il y a de plus en plus de femmes dans le secteur, donc je ne me sens pas trop seule. Je ne vois pas de réels avantages, puisque la chose essentielle est la qualité du travail fourni. Pour ma part, j'ai été nommée à la tête de la CVB suite du choix des vignerons, je n'ai donc aucune difficulté à travailler dans un monde majoritairement masculin. J'aime mon travail et me comporte sans différenciation de genre.
Qu'est-ce qui vous a incité à changer les habillages des vins de la CVB?
Tout d'abord, nous sommes partis du constat que nous n'avions d'ordre de dégustation pour nos vins, hormis celui de les présenter par couleur, et par intensité aromatique. La Cave se rendant souvent dans les foires et salons, nous devions faciliter l'accès aux consommateurs. Il est alors devenu nécessaire de classifier nos crus, que nous avons segmenté en 6 gammes distinctes, pour pouvoir orienter la clientèle dans ses recherches.
Il nous manquait aussi une identité forte et fédératrice. En effet, l'étiquette constitue un vecteur de communication important et nos vins avaient besoin d'être mieux reconnaissables. C'est le cas aujourd'hui, avec un design retravaillé: une nouvelle pastille CVB orne désormais les bouteilles, le nom du produit ainsi que la signature Cave des Viticulteurs de Bonvillars sont mis en valeur.
Au cours de votre parcours, de quelle réalisation êtes-vous la plus fière?
En premier lieu, je suis une mère, donc ma plus belle "réalisation", c'est bien sûr mon fils, et également mon petit-fils. La famille occupe une place importante pour moi.
La deuxième réalisation dont je suis le plus fière, c'est d'avoir repris la tête de la Cave des Viticulteurs de Bonvillars. Ce travail donne un sens à ma vie professionnelle. La satisfaction des vignerons de la coopérative est une véritable source d'accomplissement.
Si vous étiez un vin? Et quel plat pour l'accompagner?
Si j'étais un vin, je serais un Pinot Noir, et plus particulièrement le Vin des Croisés de la CVB. Concernant le plat, je ne me restreindrais pas, puisque ce cru peut accompagner tous les mets, et c'est cela qui le rend vraiment intéressant. C'est un vin joyeux, qui peut autant se faire dominant, que se montrer plus fin, avec un plat corsé par exemple. C'est aussi un vin de fête, il est le compagnon de tous les événements.
Quelle est votre recette personnelle du bonheur?
En deux mots, équilibre et justice. Le premier, car la vie en est faite. Dans le monde du vin, il est nécessaire de trouver un équilibre. Quant au deuxième, c'est un concept important pour moi, car je suis très émue face à des situations d'injustice. Je suis donc très attentive à ne pas en créer.
Propos recueillis par Daniel A. Santschi